L'évocation de l'hypocrisie chez Molière

Publié le par colutheanna.over-blog.com

 

L’évocation de l’hypocrisie chez Molière

Qu’est ce qu’un personnage hypocrite ?

Le personnage hypocrite a des actes qui ne correspondent pas à sa pensée et il tient une parole trompeuse en dissimulent ses véritables sentiments. Il peut aussi faire preuve de vertus qu’il n’a pas.

Etude de deux œuvres de Molière : Tartuffe et Dom Juan

Tartuffe

Le Tartuffe ou l’Imposteur est une comédie que Molière écrivit en 1664. C'est la pièce de Molière qui a suscité le plus de scandales. Elle fut interdite quelques jours après la première représentation. Pourtant, Molière n'y renoncera jamais, contrairement à Dom Juan qui n'a pas été rejouée après avoir été interdite. Lorsqu'en 1669 on joue enfin librement Tartuffe, Molière y a tout de même ajouté une modification qui porte l'habit sur l'habit de l'hypocrite : celui ci n'apparait plus en petit collet. Cela met désormais l'accent sur l'hypocrisie du personnage plutôt que sur son rôle de directeur. Parmi les thèmes abordés dans la pièce, le thème principal est effectivement l’hypocrisie. Molière prend alors un risque en dénonçant un vice : « L’hypocrisie est dans l'État, un vice bien plus dangereux que tous les autres ».

Le personnage de Tartuffe : Tartuffe est un personnage à double facette, l'allégorie de l’hypocrite et sa morale peut se résumer dans sa célèbre citation « ce n'est pas pécher que de pécher en silence », Lorsque Tartuffe apparaît dans la pièce pour la première fois, le spectateur connait déjà la sournoiserie du personnage et se demande seulement comment « les honnêtes gens » vont réussir à mettre à jour sa supercherie. Pour arriver à ses fins (toucher un héritage), le personnage n’hésite pas à jouer de son talent d’hypocrite. Il parle sous le masque de la sincérité.

 

Don Juan

Molière écrit à partir d'août 1664, Dom Juan, destiné à remplacer Tartuffe à l'affiche : courageusement, il y reprend l'attaque contre l'hypocrisie ; Dom Juan fera à son tour l'objet d'une violente attaque des dévots. La pièce est jouée 15 fois, mais Molière ne la fait pas imprimer, et elle ne sera plus représentée de son vivant.

La tirade de l'hypocrite: Dom Juan est connus notamment pour sa célèbre tirade sur l'hypocrisie récitée par Dom Juan lui-même:

« Il n'y a plus de honte maintenant à cela: l'hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus. Le personnage d'homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu'on puisse jouer aujourd'hui, et la profession d'hypocrite a de merveilleux avantages. C'est un art de qui l'imposture est toujours respectée; et quoiqu'on la découvre, on n'ose rien dire contre elle. Tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement; mais l'hypocrisie est un vice privilégié, qui, de sa main, ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d'une impunité souveraine. On lie, à force de grimaces, une société étroite avec tous les gens du parti. Qui en choque un, se les jette tous sur les bras; et ceux que l'on sait même agir de bonne foi là-dessus, et que chacun connaît pour être véritablement touchés, ceux-là, dis-je, sont toujours les dupes des autres; ils donnent hautement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglément les singes de leurs actions. Combien crois-tu que j'en connaisse qui, par ce stratagème, ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et, sous cet habit respecté, ont la permission d'être les plus méchants hommes du monde? On a beau savoir leurs intrigues et les connaître pour ce qu'ils sont, ils ne laissent pas pour cela d'être en crédit parmi les gens; et quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d'yeux rajustent dans le monde tout ce qu'ils peuvent faire. C'est sous cet abri favorable que je veux me sauver, et mettre en sûreté mes affaires. Je ne quitterai point mes douces habitudes; mais j'aurai soin de me cacher et me divertirai à petit bruit. Que si je viens à être découvert, je verrai, sans me remuer, prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers et contre tous. Enfin c'est là le vrai moyen de faire impunément tout ce que je voudrai. Je m'érigerai en censeur des actions d'autrui, jugerai mal de tout le monde, et n'aurai bonne opinion que de moi. Dès qu'une fois on m'aura choqué tant soit peu, je ne pardonnerai jamais et garderai tout doucement une haine irréconciliable. Je ferai le vengeur des intérêts du Ciel, et, sous ce prétexte commode, je pousserai mes ennemis, je les accuserai d'impiété, et saurai déchaîner contre eux des zélés indiscrets, qui, sans connaissance de cause, crieront en public contre eux, qui les accableront d'injures, et les damneront hautement de leur autorité privée. C'est ainsi qu'il faut profiter des faiblesses des hommes, et qu'un sage esprit s'accommode aux vices de son siècle. »

 

Si Molière affectionne tant les hypocrites c'est parce qu'ils sont « naturellement » acteurs et qu'ils jouent un rôle.

 

Elise Cattiaut

Publié dans MOLIERE AU CUBE

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article